C’est une excellente question ! Et pas la plus simple. La route de l’export est jonchée de pièges en tout genre et il faudra être d’une rigueur absolue pour ne pas mettre en péril votre précieuse musique. Voici les 14 étapes à suivre pour optimiser l’export de vos pistes en vue d’un mixage en studio

 

1) Aucun effet sur la piste master

Il peut être tentant, surtout quand on débute de vouloir gagner du temps et de mettre des effets sur la piste master de notre chanson, égaliseurs, compresseurs… Un limiteur peut aussi être intéressant à mettre sur une maquette pour mettre à niveau le volume avant de la faire écouter à des gens. Mais il est indispensable d’enlever ses effets pour un mixage en studio. La raison est simple, toutes les pistes passeront une par une (sample, batterie, basse…) dans le traitement au moment de l’export ce qui n’aura pas du tout le même effet que lorsque ce traitement est appliqué sur la chanson entière. L’équilibre ne sera plus du tout le même et la dynamique sera dégradée. Les effets sur la piste master sont réservés, comme son nom l’indique, au mastering, la dernière étape du traitement du son

 

2) Aucun effet sur les groupes d’instruments

Pour les mêmes raisons que ci-dessus. Il n’est pas rare de faire des groupes / stems d’instruments et de traiter le groupe entier. Typiquement utilisé sur un groupe de batterie, bitcrushing, saturation analogique… Et ces outils peuvent changer la couleur du tout au tout. Tant que possible, utilisez vos effets sur chaque pistes séparément. Une technique peut consister à appliquer les effets sur le groupe dans un premier temps, puis à les transférer sur chaque piste pour affiner les réglages. Si le mal est fait, exportez chaque piste séparément sans effets, et exportez le groupe entier de batterie avec effet. L’ingénieur du son pourra partir de la batterie entière, comme si c’était un break de batterie samplé, ce n’est pas le plus optimisé mais c’est jouable

 

3) Ne laisser que les effets constituant du son

C’est-à-dire les effets créatifs, qui changent totalement le son et que l’ingénieur ne pourra pas deviner. Typiquement un simulateur d’ampli de guitare sur une guitare acoustique. Un bitcrusher sur une batterie, un wobble sur un sample… La limite est fine entre le mix créatif du producteur et le mix de studio. L’ingé-son de studio s’occupe principalement de la stéréo, l’égalisation, la compression, la reverb, mais ne s’implique pas trop violemment dans le processus artistique, sauf demande précise. Si vous avez déjà compressé et réverbérés de votre côté, la marge de manœuvre sera faible du côté studio. Les compresseurs et les reverbs sont les deux effets les plus importants à enlever à l’export. La reverb pouvant être utilisée de manière créative, cela nous amène à notre prochain point

 

4) Dans le doute exporter avec et sans effets

Par mesure de sécurité, faites un dossier avec fx avec les effets que vous pensez préférable de laisser, et un dossier sans fx avec les sons les plus bruts possible. Si les sons avec fx ne sont pas optimisés pour le mix, l’ingé repartira de l’élément brut

 

5) Remettre ses panoramiques au centre

Surtout utile sur les voix et instruments réels enregistrés. Il est préférable d’appliquer les traitements sur un fichier centré, l’ingé s’occupera de la panoramique

 

6) Remettre ses gains à zéro

Pour les voix principalement, remettre les gains initiaux auxquels ils ont été enregistrés, donc 0db de changement. Il n’est pas rare de recevoir des pistes de backs avec 10 décibels de moins que la piste lead, malheureusement ça ne fait pas gagner mais perdre du temps. Avec le même gain sur toute les pistes, l’ingé-son peut reprendre le traitement d’une piste à l’autre et ne l’ajuster que légèrement si besoin

 

7) Exporter en WAV ou AIFF 44.1 khz / 24 bits

Le 32 bits flottant marcherait aussi et aurait pour avantage de ne pas risquer de saturer. Si vous n’êtes pas sur et débutez, exportez en 32 bits flottants. La plupart des cartes sons n’enregistrant qu’en 24 bits, le 32 bits n’a pas vraiment d’autre intérêt, d’autant que le poids du dossier en sera impacté. Si vous êtes sûr de ne pas saturer, exportez en 24 bits

 

8) Pas de saturation

Aucune piste ne doit saturer. Rien ne doit taper dans le rouge. Si c’est le cas, sélectionnez toutes vos pistes et baissez-les simultanément. Prenez l’habitude de travailler à faible volume, autour de -10 db peak sur le master, et augmentez le volume avec le potard de votre carte son

 

9) Exporter chaque piste depuis le début de la chanson

Ça parait évident mais déjà vu en studio, il faut exporter chaque piste à partir de la 1ere mesure et non à partir d’où elles commencent réellement. Les pistes doivent être synchronisées

 

10) Donner le BPM

Glissez le BPM dans le nom du projet ou un fichier texte. Le BPM est indispensable pour les déplacements d’évènements audio, dupliquer un refrain par exemple et qu’il reste calé parfaitement sur l’instru. Il est aussi très utile pour certains effets, delays, reverbs, qui ont des réglages de quantifications qui reposent sur le BPM, si le BPM est faux, la quantification sera fausse

 

11) Nommer ses pistes

La première étape du mixage est de classer les pistes par ordre d’importance. Nommez vos pistes « Voix lead », « Basse » plutôt que « Track 254 », « Track 578 », l’ingé-son vous en sera éternellement reconnaissant

 

12) Glisser un fichier d’infos dans le dossier

Vous noterez tout ce que vous estimez être important à préciser à l’ingénieur du son. Les mêmes infos dans un mail ont beaucoup plus de chances de passer à la trappe

 

13) Glisser votre version guide

Glissez votre version pré-mixée dans le dossier, elle servira de guide. Permettra de vérifier qu’un élément ne manque pas, qu’il n’y a pas eu d’erreur d’export, que tout est synchronisé

 

14) Glisser une ou plusieurs références

Glissez un ou plusieurs titres dont vous voudriez vous rapprocher le plus en terme de mix, dans le même style que votre chanson. Excessivement important car même le meilleur ingénieur du son ne peut deviner ce que vous avez en tête. Sans références, l’ingénieur fera au feeling, selon ses goûts, et si vous l’avez bien choisi vous ne serez pas déçu. Si vous envoyez un son de rock à un ingé hip-hop sans références vous risquez de trouver les batteries trop fortes !

Evidemment vous n’avez la que les clés pour optimiser votre mix, mais choisissez soigneusement votre ingénieur du son. Renseignez-vous sur qui a mixé les titres de vos artistes préférés, de vos amis, des sons qui vous plaisent et faites des tests avec 2 ou 3 studios. Ces tests seront payants chez les studios sérieux, mais mieux vaut faire cet investissement plutôt que de devoir recommencer le mix d’un album entier car le choix de départ n’était pas le bon.  Aussi, même le meilleur ingé-son ne pourra pas faire de miracles si les prises sont de mauvaises qualité, achetez au minimum un micro et une carte son moyenne gamme et optimisez votre pièce d’enregistrement. A vous de jouer !